Indemnisation des victimes des essais nucléaires: l’État doit s’engager en faveur de la reconnaissance de toutes les victimes
«La question des conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires en Polynésie, mais aussi en Algérie, ne cessera d’empoisonner la vie des vétérans et des populations locales. Ils subissent actuellement une double-peine : en plus de payer leur irradiation du prix de leur santé et de leur vie, ils sont négligés dans leur statut de victimes.
C’est suite au travail parlementaire des écologistes ces dernières décennies, et aux nombreuses propositions de loi que nous avons pu déposer, que l’omerta institutionnelle s’est fissurée et a donné lieu à la loi Morin. C’est aussi grâce à l’activisme de certaines associations comme l’AVEN (Association des Vétérans des Essais Nucléaires) ou d’élus polynésiens que le débat sur le statut des victimes a pu avancer. Désormais, toute personne atteinte de l’une des 22 maladies considérées comme radio-induites et résultant d’une exposition aux essais nucléaires français a le droit de bénéficier d’un régime de réparation intégrale des préjudices subis. Trois ans plus tard, seules 1% des demandes formulées avaient donné lieu à indemnisation et moins de 10% de l’enveloppe allouée aux indemnités était dépensée. Depuis 2013 le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) a obtenu le statut d’autorité indépendante et la Commission de suivi des conséquences des essais nucléaires est passée de la tutelle du Ministère de la Défense à celle du Ministère de la Santé, des gages encourageants pour améliorer le processus d’indemnisation, mais malheureusement insuffisants…et pour cause : l’article 4 de la loi Morin constitue le principal frein à l’indemnisation des victimes, car le concept de ‘risque négligeable’ empêche leurs dossiers d’être jugés recevables.
Rappelons qu’aux États-Unis le Congrès avait voté en 1990 le Radiation Exposure Compensation Act, une loi qui a permis l’indemnisation d’un peu plus de 16 000 plaignants pour un montant de plus d’un milliard de dollars. En France, on a beau avoir sanctuarisé un budget pour l’indemnisation des victimes, on tarde encore à vouloir les reconnaître : François Hollande doit rompre avec ses prédécesseurs et exprimer des excuses officielles à l’adresse des victimes. Il doit aussi permettre de réviser la loi pour une meilleure prise en compte de l’ensemble des victimes : les critères nécessaires à l’obtention du statut de victime sont aussi nombreux qu’irréalistes ».
Et Michèle Rivasi de conclure :
« N’oublions pas non plus que cette catastrophe silencieuse continue et que les générations futures en paieront le prix même après l’arrêt des essais nucléaires: de plus en en plus d’enfants et de familles sont touchées par des cancers, des leucémies, etc.».
(1) Commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité