Industrie textile : pour protéger la compétitivité française, le Front National retourne sa veste

Marine Le Pen prétend placer au cœur de son projet le « Fabriqué en France ». Pourtant, elle et ses collègues élus au Parlement européen refusent de voter toute initiative visant à améliorer la compétitivité des produits manufacturés européens ou français.
Le Front National vient d’être pris en flagrant délit d’incohérence politique, achetant son matériel militant au Bangladesh plutôt qu’en France. Mais selon ses responsables, le Front National n’avait pas le choix, nous citons :
« Ce n’est pas du tout contraire au programme de Marine Le Pen]. Nous, nous demandons à ce que les produits soient fabriqués en France. Ce qui a été le cas puisque le brodage a été fait en France. La finition est française. Le problème du fournisseur était un problème de main-d’œuvre française qui n’est pas compétitive. C’est pour ça que nous nous battons pour la production française. »

Premièrement, on ne peut pas vouloir lutter contre un problème en l’alimentant par ses propres actes. Comme le disait si bien Coluche : « Quand on pense qu’il suffirait que les gens n’achètent plus pour que ça ne se vende plus ». Et surtout si l’on considère que ces achats favorisent des entreprises qui font du dumping social la norme, n’ayant aucun scrupule à exploiter des travailleurs dans des conditions indignes au Bangladesh ou ailleurs. C’est d’ailleurs pour ces raisons que nous appelons à tirer toutes les conclusions du [drame ayant eu lieu au Rana Plaza, le 24 Avril 2013, avec des conséquences effroyables : 1 134 morts et près de 2 000 blessés parmi les travailleurs de l’industrie textile.

Deuxièmement, on ne peut pas vouloir privilégier et protéger le « Made in France » si l’on ne vote pas pour une traçabilité effective des produits issus de l’industrie du textile, qui permettrait de connaître l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement et sanctionner les acteurs irresponsables. En toute logique économique, la régulation efficace de ce commerce – aux pratiques aussi cachées qu’honteuses – aura un impact direct sur les distorsions de concurrence.

C’est pourquoi le Parlement européen a appelé la Commission européenne à s’attaquer à ce problème le 27 avril dernier. L’initiative-phare de l’Union pour le secteur de la confection invitait justement la Commission à proposer une législation mettant en place une « devoir de vigilance » obligatoire pour la chaîne d’approvisionnement, basée sur les nouvelles lignes directrices de l’OCDE et la résolution de l’OIT sur le travail décent. C’est avec de tels mécanismes que nous améliorerons les conditions de travail et lutterons contre les distorsions de concurrence, permettant à la filière textile française de gagner un regain de compétitivité.

Mais le Front National a voté en toute incohérence, et surtout très courageusement. Sur les 20 membres que compte sa délégation au Parlement européen : 8 n’étaient pas présents le jour du vote (Edouard Ferrand, Florian Philippot, Jean-François Jalkh, Louis Aliot, Marine Le Pen, Nicolas Bay, Sophie Montel, Jean-Luc Schaffhauser) et les 12 présents se sont abstenus (Bernard Monot, Dominique Bilde, Dominique Martin, Joëlle Mélin, Marie-Christine Arnautu, Marie-Christine Boutonnet, Mireille d’Ornano, Mylène Troszczynski, Philippe Loiseau, Steeve Briois, Gilles Lebreton, Sylvie Goddyn). Vous pouvez vérifier ici : http://www.votewatch.eu/en/term8-eu-flagship-initiative-on-the-garment-sector-motion-for-resolution-vote-resolution.html

On savait que le Front National ne faisait pas dans la dentelle, mais là une chose est sûre : il peut aller se rhabiller !

NB: Jean-Marie Le Pen et Bruno Gollnisch ne font pas partie de la délégation FN au Parlement européen (ils siègent parmi les Non-Inscrits), mais ils étaient bien absents. Aussi.

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