Gazoduc STEP : un projet purement politique
Une étude de la Commission européenne remet en question la viabilité économique du projet de gazoduc STEP reliant l’Espagne et la France à travers les Pyrénées-Orientales. Cette interconnexion, au coût approchant les 450 millions d’euros, ne correspond à aucun besoin réel indique l’étude. Nous avons écrit au président Macron afin qu’il s’oppose à ce projet.
Le Projet STEP (South Transit East Pyrenees) peut être considéré comme la première étape du méga projet gazier Midcat, d’environ 500 km de long au total et évalué à 3 milliards d’euros. Le projet STEP/Midcat est soutenu depuis longtemps par la Commission européenne qui l’a reconnu comme d’intérêt commun dans sa troisième liste prioritaire.
En 2016, la Commission a confié une analyse coûts-bénéfices du projet STEP à un bureau de consultant indépendant finlandais : Pöyry. Cette étude n’a pas été rendue publique.
Michèle RIVASI, co-rapporteure sur la gouvernance de l’énergie au Parlement européen a demandé l’accès à cette étude à la Commission européenne qui a refusé, arguant de son intérêt économiquement sensible et demandant l’approbation des promoteurs du projet. Cette étude, dévoilée par Reuters et la Marea, démontre très clairement que le projet n’est pas viable économiquement, qu’il n’a aucun intérêt pour la sécurité d’approvisionnement des deux pays.
C’est pourquoi, le 17 avril 2018, en amont de sa venue devant le Parlement européen à Strasbourg, nous avons adressé le courrier ci-dessous au président Macron. Une lettre co-signée par 11 eurodéputé.e.s français.e.s et espagnol.e.s de divers bords politiques.
Monsieur le Président,
Comme vous le savez, le projet de gazoduc transfrontalier STEP/MIDCAT prévoit de relier les réseaux de gazoduc des deux côtés des Pyrénées et devrait courir d’Hostalric en Catalogne à Barbaira en Occitanie, sur une longueur de plus de 200 kilomètres. Il s’agirait d’acheminer le gaz algérien via l’Espagne au reste de l’Europe et inversement du gaz norvégien et russe vers la péninsule ibérique.
Coûts exorbitants et opaques, impact environnemental désastreux, contradiction manifeste avec les engagements pris à la COP21… les raisons d’abandonner une telle initiative ne manquent pas. Des collectifs citoyens sont ainsi mobilisés des deux côtés de la frontière, et des assemblées locales à l’image de l’assemblée départementale des Pyrénées Orientales s’opposent à la poursuite du projet. Le gouvernement français précédent d’ailleurs l’avait abandonné car il n’était pas convaincu du bénéfice pour les consommateurs et l’environnement.
Interpellé, votre gouvernement par la voix de Nicolas Hulot a fait savoir que pour éclairer la décision de réaliser ou non ce projet, des études techniques et économiques d’évaluation étaient actuellement menées, notamment par la Commission européenne. Cependant, cette dernière a récemment fait savoir son refus d’informer le public « compte tenu du caractère commercial » du document et en précisant que toute diffusion de l’étude pourtant financée sur fonds public devait recevoir au-préalable « l’accord du promoteur du projet » !
A l’occasion de votre venue à Strasbourg pour vous adresser au Parlement européen et rappeler la nécessité pour les pouvoirs publics de tenir compte de l’avis des populations dans la formulation de politiques publiques, nous vous demandons donc d’une part d’obtenir de la Commission qu’elle publie cette étude, et d’autre part de signifier à votre homologue espagnol votre opposition au projet STEP à l’occasion du Sommet franco-espagnol qui se tiendra bientôt en France.
Comptant sur votre intervention, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’assurance de notre haute considération.