L’Europe s’enlise dans des projets gaziers
Mauvaise nouvelle pour le climat et la transition énergétique, l’Union européenne va soutenir des projets gaziers fortement subventionnés, fausser le marché de l’énergie et menacer le développement urgent de programmes d’efficacité énergétique et de capacités d’énergie renouvelable, qui sont la clé de la future énergie européenne. Et ce malgré l’opposition des écologistes qui ont mené la bataille au Parlement européen.
En novembre 2017, la Commission a présenté une liste des « Projets d’Intérêts Communs » (PIC) éligibles pour des procédures administratives accélérées et d’importants fonds publics. Cette liste prioritaire comprend des interconnexions électriques, mais aussi des terminaux méthaniers et des gazoducs. En effet, cette liste comporte plus de 100 projets gaziers (dont les projets Midcat et Erida et le gazoduc TAP) qui vont être éligibles pour des fonds publics comme le financement du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (CEF). Jusqu’à présent, le programme CEF a dépensé plus de 1,2 milliard d’euros de subventions publiques directes pour les projets gaziers – des fonds publics qui auraient pu être utilisés pour financer la transition énergétique au lieu de soutenir les combustibles fossiles.
Rien ne justifie de nouveaux investissements dans le gaz. L’Union européenne dispose déjà de suffisamment de capacité pour couvrir la demande de gaz jusqu’en 2040 sans construire de nouvelles infrastructures. En réalité, la plupart des États-membres ont des surcapacités grandissantes et de nombreuses infrastructures existantes sont sous-utilisées. Les terminaux méthaniers existants fonctionnent à moins de 25% de leur capacité. Quant à la demande globale de gaz, elle a chuté de presque 13% depuis 2010. Alarmés et en désaccord profond avec ce choix politique de la Commission, ainsi que la méthodologie utilisée par la Commission pour établir la liste et le peu de transparence déployée, Michèle RIVASI et plusieurs députés européens ont demandé au Parlement européen de bloquer la liste PIC. Malheureusement, une majorité d’élus conservateurs et libéraux ont rejeté cette objection le 14 mars.
« Cette liste est le symbole de la puissance de l’industrie gazière, regrette Michèle RIVASI. Il faut casser les mythes diffusés par l’industrie gazière du besoin de nouvelles infrastructures de gaz ». Le gaz fossile ou « gaz naturel » n’est pas une énergie propre, il est incompatible avec une élimination du carbone. Il émet une quantité non négligeable de CO2 lors de sa combustion et il laisse surtout s’échapper du méthane, un puissant gaz à effet de serre, dont l’impact est 86 fois plus important que le CO2 sur une période de 20 ans. Cet enfermement européen dans un carcan gazier est en contradiction directe avec le vote du Parlement européen de supprimer les émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici 2050. Pour les écologistes, il est clair que si toutes ces infrastructures prévues dans cette nouvelle liste se construisent, il n’y aura aucun moyen de sortir de l’énergie gazière pendant des décennies, nous perdrons beaucoup d’opportunités d’investir dans des modèles plus durables et innovants et rendant difficile de maintenir le réchauffement climatique en dessous de 2°C.
Nous avons déposé en plénière une objection à cette liste, mais une majorité de députés a voté contre cette objection et soutient malheureusement cette troisième liste prioritaire (détail des votes des élus français ci-dessous).