Glyphosate : retour sur notre combat pour l’interdiction de cette molécule dangereuse
Si vous avez autant entendu parler du glyphosate, c’est sûrement grâce à notre action politique sur le long cours. Nous n’avons économisé ni notre énergie, ni notre temps, pour faire du glyphosate un véritable enjeu européen, et force est de constater que nous y sommes parvenus.
Mars 2015. Le Circ, agence des Nations unies, déclare le glyphosate “cancérigène probable”.
Novembre 2015. L’EFSA, Autorité européenne sur la sécurité alimentaire, conclut que le glyphosate est sans danger, ni génotoxique, ni cancérigène.
Décembre 2015. 96 scientifiques alertent le Commissaire en charge de la santé et de la sécurité alimentaire, Vytenis Andriukaitis, au sujet de l’évaluation de l’EFSA et du caractère scientifiquement contestable du rapport de l’Institut allemand d’évaluation des risques (BfR).
Alors que le glyphosate ne figure pas encore à l’agenda médiatique et politique, mais que nous savons que sa procédure d’autorisation va être renouvelée nous prenons notre plume pour appeler le Commissaire européen à la Santé de ne pas renouveler son autorisation. Le 28 janvier 2016, Michèle RIVASI initie une lettre collective (avec 65 autres députés de quatre groupes politiques différents) qui entame notre longue campagne que nous avons affectueusement surnommée « la saga du glyphosate ».
Le 4 mars 2016 nous publions notre première infographie à ce sujet : 7 raisons d’interdire le glyphosate.
Comprenant que ce sujet ne commencerait à passionner l’opinion publique et les média que grâce à un coup de comm’, nous tentons en mai 2016 de faire le buzz en finançant l’analyse d’urine de 48 eurodéputés, afin de montrer les disparités de contamination. Et surtout rappeler que même celles et ceux qui mangent bio sont contaminés tellement ce pesticide est omniprésent. Nous avons même proposé (très sérieusement) au Commissaire européen à la Santé de se prêter à cette expérience, en vain.
Alors que nous nous battons depuis mars 2016 (voir notre échange de courrier avec l’EFSA) pour exiger la publication de l’ensemble et de l’intégralité des études toxicologiques de l’EFSA (l’Agence européenne en charge de la sécurité alimentaire) ayant permis la précédente autorisation du glyphosate, nous recevons une fin de non-recevoir en janvier 2017. Elles seront publiées, mais censurées en partie pour protéger les secrets d’affaire du géant de l’agrochimie Monsanto
Juin 2016. La Commission européenne décide d’étendre l’autorisation du glyphosate au sein de l’Union pour une période de 18 mois maximum.
Mars 2017. L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) conclut au caractère non cancérigène du glyphosate.
Mars 2017. Publication des “Monsanto Papers” aux Etats-Unis.
En mars 2017, à l’occasion du lancement de l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) visant à interdire le glyphosate, Michèle RIVASI et José BOVE se prêtent au jeu pour montrer qu’il n’est pas si compliqué de signer l’ICE si même eux sont capables de le faire.
Le 1er juin 2017, constatant que l’EFSA ne souhaite décidément pas nous laisser accéder aux études scientifiques ayant permis l’autorisation du glyphosate, nous décidons de saisir la justice européenne pour non-divulgation, espérant ainsi créer une jurisprudence en faveur de l’environnement et de la santé.
Michèle RIVASI, toujours à la manœuvre pour notre délégation, continue de son côté le combat institutionnel pour empêcher le non-renouvellement de l’autorisation du glyphosate. La marge de manœuvre étant limitée face aux eurodéputés conservateurs, nous sommes tout de même parvenus à obtenir du Parlement européen de se positionner en faveur d’une sortie du glyphosate en trois ans.
Juin 2017. L’initiative citoyenne pour l’interdiction du glyphosate atteint en quatre mois le million de signatures, la Commission européenne doit y répondre avant janvier 2018.
Juin 2017. Débat au Parlement européen sur la qualité de l’évaluation scientifique de l’EFSA.
Juin 2017. Nouvelle proposition de la Commission aux États membres de renouveler la licence pour 10 ans.
Septembre 2017. “La Libre” et quatre autres médias européens révèlent que les conclusions d’études cruciales du rapport de l’EFSA ont été copiées du document de Monsanto.
Les lobbyistes de Monsanto sont interdits d’accès au Parlement européen ! Les écologistes ont obtenu cette sanction suite au refus de Monsanto d’être auditionné par une commission parlementaire.
11 octobre 2017. Audition publique au Parlement européen.
23 octobre 2017. Débat et vote au sein d’un comité d’experts représentant les États membres sur la réautorisation du glyphosate.
Le 26 octobre 2017, notre groupe au Parlement européen introduit une demande de création de commission d’enquête, dont le mandat serait d’enquêter sur le processus qui a mené à la décision de proposer le renouvellement de l’autorisation du glyphosate au sein de l’UE.
Décembre 2017. Fin de l’extension de l’autorisation du glyphosate. Date limite pour la décision de la Commission européenne en accord avec les États membres.
Après avoir bataillé au sein de la Conférence des Présidents de groupes politiques nous obtenons in fine en janvier 2018 la création d’une Commission spéciale sur les procédures d’autorisation des pesticides, dont le glyphosate. Ce genre de Commission spéciale est pourtant très difficile à obtenir, mais le travail acharné des eurodéputés et de leurs collaborateurs a payé.
En mai 2018, le groupe des Verts/ALE dévoile une étude pilote de l’Institut Ramazzini en Italie qui montre que le glyphosate et les herbicides dérivés modifient certains paramètres biologiques significatifs, y compris à des doses officiellement considérées comme sûres.
Forts du succès médiatique du premier test visant à mesurer la concentration de glyphosate dans l’urine d’eurodéputés, nous lançons une deuxième campagne mais cette fois-ci pour mesurer la présence de pesticides (et non du glyphosate) perturbateurs endocriniens dans les cheveux de citoyens européens.
Enfin, avec d’autres eurodéputés d’autres groupes politiques, les écologistes au Parlement européen ont commandé une étude détaillant les pratiques de plagiat de l’agence allemande BFR (équivalent de l’Anses en France, et de l’EFSA dans l’UE), chargée d’évaluer la demande de renouvellement du glyphosate. Conclusion : celle-ci s’est en effet fortement inspirée d’études officiellement indépendantes mais en fait entièrement rédigées par Monsanto, alors que l’EFSA s’est basée sur l’étude du BFR !
21 janvier 2019. Adoption du rapport final de la Commission PEST contenant des recommandations solides pour la protection de la santé et de l’environnement. Alors qu’un article hors sujet d’Euractiv sème le doute quant à nos intentions politiques concernant le glyphosate, nous publions une explication de vote sur un amendement précis du rapport afin de rappeler le contexte et les faits.
7 mars 2019. La Cour de Justice de l’Union européenne donne raison aux eurodéputés Verts-ALE Michèle Rivasi, Bart Staes, Heidi Hautala et Benedek Javór et annule « les décisions de l’EFSA (l’autorité européenne en charge de la sécurité des aliments) refusant l’accès aux études de toxicité et de cancérogénicité de la substance active glyphosate ».
17 avril 2019. Le Parlement européen adopte la législation alimentaire générale révisée qui encadre les législations européennes spécifiques en matière de denrées alimentaires , y compris celles relatives aux pesticides, OGM, additifs alimentaires et nouveaux aliments. Y figure notamment l’obligation de publier les études appuyant une demande d’autorisation de substance. Une avancée liée à notre travail et à la forte mobilisation citoyenne autour du cas du glyphosate.
10 mai 2019. Publication par Le Monde du « Fichier Monsanto » : des dizaines de personnalités dont Michèle RIVASI, Karima DELLI et JOSÉ BOVÉ ont été fichées et ciblées en raison de leur opposition à Monsanto.
13 mai 2019. À l’occasion de la publication d’un rapport sénatorial le co-rapporteur (UDI) Pierre Médevielle tient des propos étonnamment cléments sur le glyphosate. José BOVÉ s’étonne qu’il reprenne mot à mot les éléments de langage de Monsanto.
14 mai 2019. En pleine polémique sur le rapport sénatorial, on apprend que Bayer-Monsanto est condamné à payer 2 milliards de dollars par un jury californien suite au cancer d’un couple certainement lié au Roundup.